« JOUR 25 » Virginie le Vaillant 11 avril 2020 – Publié dans Littérosa – Mots clés: , ,

Virginie le Vaillantjuriste spécialisée en droit des affaires, actuellement enseignante en français langue étrangère en ligne.


Tout est bien dans le monde qui est le mien. Aujourd’hui, j’ai colorié un arc-en ciel.

Confinés depuis maintenant 25 jours, si l’on réussit à écarter de nos pensées nos malades, nos morts, la souffrance de nos soignants et des familles, on pourrait même dire que tout se déroule en douceur. Très paradoxal, après la période de stress intense et de sidération que pour beaucoup nous avions ressentis les premières semaines. Bien sûr, tout ne coule pas de source, nous devons encore faire preuve d’adaptation, nous occuper des enfants, des devoirs, nous improviser professeurs. Répondre à toutes leurs interrogations. Gérer parfois nos peurs, les angoisses de nos proches. Faire face aux cauchemars et aux nuits agitées. Mais quand même….

Depuis quelques jours, le soleil est réapparu dans nos maisons, dans nos cœurs.

Une certaine quiétude ne se serait-elle pas installée dans notre quotidien ? De toute part, quasiment, j’entends dire : « nous nous habituons, finalement ». Nous avons du Temps, enfin. Pour nous, pour notre famille, pour notre couple. On se recentre, on se recueille, sur l’Essentiel. 

Nous n’avions plus le temps de profiter les uns des autres. Nous courions, de rendez-vous en rendez-vous, mais ne prenions le temps ni de partager nos repas, ni d’écouter nos enfants, ni même de leur lire une histoire. N’avions-nous pas perdu le sens des vraies valeurs ?

Bulle de douceur, parenthèse de bonheur, pour certains d’entre nous. Car on s’accorde du temps, du temps imposé, soit, mais du temps. Le temps de lire, le temps d’écrire, le temps de profiter de l’instant. Il était temps…

Enfin on se pose, on s’arrête, on écoute. On prend soin de soi, de son chez-soi, des siens, des autres aussi. Et de cuisiner, et de ranger son nid douillet, de contacter des proches, de se rappeler aux bons souvenirs d’amis perdus, éloignés, d’écrire des lettres à des grands-parents inconnus, confinés en Ehpad, de coudre des blouses pour des infirmières. Bulle de retrouvailles. L’union fait la force. 

Ensemble, liés, unis, comme un embrun de folie. Une épuisette de ressources, un vivier de bonnes volontés. Des ondes positives circulent. On se surprend à commencer sa journée par une gratitude, à la terminer de la même manière. Cultivons notre jardin. Autour de nos essentiels. Le cœur purifié par ces dernières journées, n’oublions rien de tout cela lorsque ce sera terminé. Réfléchissons, à de nouveaux modes de pensées, de nouvelles vies, de nouvelles structures, de nouvelles relations, un nouveau modèle économique peut-être. Redonnons la suprématie à ETRE sur avoir.

La terre se sent si bien sans nous, même mieux. Elle respire de nouveau. Daignons l’écouter, tirer les conséquences qui s’imposent. Respirons aussi, au rythme de son souffle, enfin retrouvé.

Balayons le superflu. Jetons l’inutile. Ne gardons que l’essentiel insufflé ces derniers jours. Conservons cette simplicité. Cessons nos courses folles, cet appât du gain, ce capitalisme démesuré.

Dans cet avenir arc-en-ciel, que nous pourrions inventer, écrire, créer. Aimer.

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